mardi 30 septembre 2014


J'ai remarqué qu'une fille, ça parle beaucoup à la première personne du pluriel. Nous nous nous. Un jour je ne vais pas bien et je me rends compte que c'est parceque mon frigo est vide. Et débranché. Sa porte est à demi ouverte, le courant d'air qui passe par un trou dans le plafond la fait osciller légerement. On dirait même qu'elle fait un petit bruit, mais je suis pas sûr.
Au même moment mon ventre gargouille, grôôôô bleu bleu, et la connexion se fait.
"J'ai faim, c'est pour ça !" (Que ça va pas bien)
Après déballage de la notice, je branche, mais j'ai toujours faim. Je téléphone à un bon ami, qui est connu pour savoir plein de choses dans un peu tout les domaines. Finement aiguillé, je file à Super U, acheter de la nourriture. Il fallait y penser !
Ce magasin est magnifiquement éclairé, avant ça me faisait peur mais maintenant je m'en fou, j'arrive même à rigoler comme un con tout seul et faire des blagues. Je vous ai raconté que je me suis même fait engueulé et cherché/traqué par des vigiles tout excités, parceque je payais en pièces en chocolat ?
Alors je rentre en sifflotant, dans cette boutique. Je fais donne un coup de pied dans le tourniquet, on se connait bien tous les deux. Il tourne 5 fois sur lui même, et je passe par dessus comme un cowboy.
Après on s'en fou, peu importe ce que j'achète, ca apporte rien à l'histoire.
Toujours le même bizness autour de la machine à peser les légumes.
Je vous en prie, allez y
Non non, c'est à vous
On y voit rien
Ca marche pas
J'ai appuyé sur "tomates", pourtant
Attendez je vais vous aider, madame (vieille bique)
Voilà
Merci jeune homme
De rien
Après trois vieilles biques, je peux enfin peser mes putains de bananes
Déjà j'en pèse une, car toutes les bananes ensemble, parfois ça crée une erreur qui est connue dans le monde de l'informatique des machines de pesage. On m'a déjà interpellé pour ça. Monsieur ! Une par une, les bananes.
Bon, d'accord.
Les bananes pesées, je vais en caisse et là je tombe sur une caissière. Qui ici sont gentilles. Y'a surement du briefing pour le contact client. Mais bon elles sont bien, c'est bien fait. On y croit presque, qu'on est leur ami.
Mais en fait c'est pas à Super U que je voulais aller avec vous. Je me suis trompé, c'est pas grave.
On va prendre un exemple sans détailler le contexte.
Prenons ma rue à moi. J'habite dans un immeuble, qui est de travers, et tout en hauteur, si on se met debout contre lui, quand on est dans la rue, on a presque l'impression de le redresser un peu.
On ouvre la porte, même si on aurait pu passer dans le trou du mur à coté. En rampant. Ou même juste accroupi.
Mais ouvrir la porte donne l'impression de vivre normalement. Mais y'a pas besoin d'ouvrir la porte puisque la personne dont je veux parler est sur le trottoir. Donc on ferme la porte, ou on ressort du trou, ca dépend ce qu'on a choisi comme style d'entrée, et on va vers la dame.

La dame, c'est la commerçante du dessous. Une grande dadette, un peu comme moi, et comme l'immeuble. Tout en hauteur et toujours dans des postures qui montrent que l'équilibre est difficile à maintenir.
On parle. Moi je suis décalé, ou plutôt, excessivement affable, peut être. Trop le sourire, qui descend plus des dents, comme si j'étais bloqué.
Ca peut faire un peu peur.
Bon, mais alors elle me raconte son voyage chez les inuits. J'écoute, j'écoute. Les danses tribales, les courses en scooter des neiges, la coke, la chasse à la baleine, bon, super. A la limite je m'en fou je déteste les baleines, ces boules de graisse qui s'amusent à gober sans pitiés des bancs de mignons petits poissons.
Son récit est poignant, personellement je me fou des peuples primitifs, mais c'est vrai que ça a l'air sympatoche.
Je remarque juste que c'est moi qui suis quand même actif, dans la discussion. C'est moi qui amène les questions, et qui nourri le peu de lien qu'on a depuis 5 minutes. On peut pas dire que je me sens ami, mais un peu.
Je remarque qu'elle dit pas qu'elle est allé chez les inuits. Mais "nous".
Plus tard, si je lui demande si ça va, si elle veut pas des tomates, que j'ai en trop, elle me dit "Nous allons bien, nous avons des légumes par l'intermédiaire de (je sais plus quoi)"

Pareil, un jour à une exposition, la peintre à qui je parle, elle me fait le coup du nous.
Géneralement, ça vient si tu as trop de sourire, que tu es bloqué avec un air idiot.
Elle m'a même dit plus tard, 1 minute après environ, que son nous, il faisait du karaté avec des ceintures je sais plus quoi. Enfin ça veut dire qu'il est très fort. Faut être idiot pour pas comprendre. Même moi j'ai presque compris.
C'est la tactique du nous, tactique qui permet d'esquiver un je tu, et ne pas me laisser rêver qu'il pourrait y avoir du nous, entre je et elle. Que le nous est entre eux, et que attention, le karaté ça fait mal.
Alors je dis je, elle dit nous, quand je dis tu, elle me dit eux, si je dis vous, elle me dit ils, si je dis moi, elle me dit tu, et eux. Moi ? Non, ils. Elle, je, tu.

A la fin, on sait tout juste qu'on est soit même, ca tourne dans la tête. On se rentre chez toi, par le trou, qu'ils ont fait dans notre nous à soi tout seul, eux.
On se repose. Dans notre tête, on vérifie qu'on est bien je. Oui, ça semble. On oublie les ils et eux. On se demande ou sont les elles. On croit les voir mais c'est des nous. Des nous et eux.
Alors je vouvoyes les filles, par précaution, pas par respect.

C'est fatiguant tout ça !
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